Lettre à nos députés

Monsieur le Député,

Nous sommes plusieurs équipes du CMR (Chrétiens dans le Monde Rural) engagés les uns ou les autres dans la politique, le syndicalisme, l’action sociale, ou tout simplement citoyens responsables en Loir-et-Cher, et nous souhaitons vous interpeller à propos de la politique française vis-à-vis des migrants.

La fréquence et l’ampleur des arrivées de ceux-ci en Europe ne se démentent pas; ceux qui s’y engagent le font au péril de leur vie, en Méditerranée ou au travers des Alpes. Ces 14 derniers mois, plus de 2000 personnes ont péri ou sont portées disparues. Nous sommes scandalisés et bouleversés par leur misère et leur dénuement.

Certes, en 2016, plus de 36 000 personnes ont obtenu une protection internationale en France. Et dans le cadre fixé par le Conseil de l’Union européenne de septembre 2015, la France s’est également engagée à accueillir 31 000 demandeurs d’asile en provenance d’Italie ou de Grèce. Mais cet objectif semble loin d’être rempli… à commencer par notre département de Loir-et-Cher ou nous avons accueilli, et au « compte-gouttes » à peine 200 migrants à notre connaissance.

Chaque jour affluent en France de nouveaux migrants contraints de dormir à la rue en raison du manque de places d’hébergement.

Notre gouvernement veut distinguer les « migrants économiques » et les « réfugiés politiques ». Pourtant, les études scientifiques et l’expérience de terrain montrent que les motifs de départ sont multiples, complexes et bien souvent liés entre eux : violence politique, religieuse ou culturelle, faillite politique et économique, absence de perspectives d’avenir, santé, dérèglement climatique,…Un tel distinguo n’a donc pas vraiment de sens.

Certaines dispositions du projet de loi « pour une immigration maitrisée et un droit d’asile effectif » actuellement examiné par l’Assemblée Nationale, nous préoccupent particulièrement. Et nous vous demandons de ne pas voter les dispositions des articles (6, 8 et 16) qui prévoient :

– de réduire les délais pour faire appel d’une décision de rejet de l’OFPRA en le rendant quatre fois plus court que le délai de droit commun
– de permettre de renvoyer certaines personnes avant qu’une décision finale ne soit rendue sur les risques de persécutions qu’elles encourent dans leur pays
– de banaliser le recours à la détention en augmentant la durée de détention des étrangers. Le droit international oblige les Etats à n’utiliser la détention que comme une mesure de dernier ressort, au cas par cas, en excluant les enfants

Par ailleurs, la reconduite « massive » des personnes déboutées est peu réaliste. Nous pensons en particulier que l’accès à un titre de séjour des personnes présentes depuis plusieurs années sur le territoire national, dont l’éloignement n’est plus envisageable, doit être privilégié. Cette mesure permettrait de donner des perspectives de sortie de l’hébergement à des milliers de familles et atténuerait de ce fait l’extrême saturation de ces dispositifs.

Chargé que vous êtes, à votre niveau, de mener les destinées du pays, nous souhaitons vivement avoir connaissance des décisions que vous prendrez et soutiendrez au cours de cet examen de loi. Nous serions fiers que, grâce à votre intervention, la France prenne sa part à l’aide que nous demandent ces frères en humanité.

Recevez, Monsieur le Député, nos sincères salutations et toute notre considération.

Pour les équipes des secteurs de Mer, Mont-près-Chambord, Contres, Ouzouer-le-Marché et Montoire,

La présidente de la fédération CMR 41

M.Ange Coly