Article paru dans Agir en rural n°120, « Face au changement climatique, quelles réponses ? »
Nous sommes de plus en plus nombreux à réfléchir sur nos modes de consommation et à introduire des petits gestes écologiques dans notre quotidien. Parfois, certaines personnes vont plus loin. C’est le cas d’Aurélie et de Cédric Heim, âgés respectivement de 36 et 37 ans qui se sont lancés dans l’ouverture d’une épicerie de produits en vrac et de produits locaux.
Aurélie, avec ton mari Cédric, vous avez ouvert une épicerie de produits en vrac et locaux où les gens viennent avec leurs contenants pour limiter, voire supprimer, les emballages. Pourquoi un tel projet et comment s’est-il concrétisé ?
Depuis trois ans, avec mon mari, nous sommes dans une démarche écologique. A la base, je fais de la vente à domicile de produits ménagers biodégradables, donc respectueux de l’environnement. Ce sont des produits concentrés que les clients vont ensuite diluer. Du fait qu’ils sont concentrés, leurs emballages sont réduits. Par rapport aux produits ménagers nous limitions nos déchets mais nous avons voulu aller plus loin dans la démarche et l’étendre à l’ensemble de notre consommation. Mais en faisant le tour des magasins, nous nous sommes rendu compte que financièrement et écologiquement on ne s’y retrouvait plus.
Mon mari, qui était en pleine recherche professionnelle, a voulu utiliser ses compétences de manager de rayon en grande surface, pour ouvrir une épicerie de produits en vrac sur la région de Saverne. En cherchant un local, nous sommes tombés sous le charme de celui-ci. Il a un parking et il est situé en périphérie de Saverne. Nous le voulions aussi accessible aux gens des villages autour. La taille de ce local nous permettait de développer aussi dans notre future épicerie des produits frais locaux. En mars 2019, ce local nous a permis d’agrandir la vision de notre projet.
Aurélie, je suppose qu’avant, comme beaucoup de personnes, tu faisais tes courses dans un supermarché classique. Quelles différences te frappent ici au VracOmarché ?
Quand je retourne dans un supermarché classique, ce qui me fait mal au cœur, c’est de voir les caddies qui débordent de plastiques. Les gens viennent ici pour le concept mais aussi pour la convivialité. Nous avons voulu créer un esprit familial. Les personnes viennent avec leurs enfants. Nous nous sommes appuyés sur notre propre expérience. Nous avons trois enfants et nous savons ce que c’est de faire les courses avec eux. Nous avons aménagé un espace pour les enfants au sein du magasin. Les gens viennent en famille et parfois les enfants râlent quand il faut repartir. Je m’intéresse aux personnes, je leur demande comment ça va aujourd’hui. Ce qui différencie surtout notre commerce, c’est la convivialité et le fait que ce soit aussi un lieu d’échange.
Je suppose que les clients qui viennent chez vous sont déjà la plupart dans une démarche écologique. Penses-tu que votre magasin vrac et local puisse aider à sensibiliser un plus large public ?
Oui, si les clients viennent ici, c’est qu’ils ont déjà une démarche par rapport à la réduction des déchets. Mais ce qui a été vraiment énorme, c’est que pendant la période de Noël, nous avons vendu beaucoup de produits ‘’0 déchet’’ que les gens voulaient offrir à leurs proches. Les personnes qui ont reçu ces cadeaux sont ensuite venues au magasin. Je pense que c’est ainsi qu’on va pouvoir avancer, quand les personnes converties qui fréquentent le magasin vont par l’exemple convertir leurs proches.
Ton mari Cédric fait partie d’un réseau plus large, le « réseau vrac ». Est-ce que des réflexions sur une consommation plus écologique sont vraiment en cours ?
En effet, Cédric adhère à un réseau pour les gérants de commerces en vrac. Ils se réunissent plusieurs fois par an pour partager ensemble leurs avancées et pour discuter de nouvelles propositions. Ce réseau propose des groupes de réflexion pour réduire encore davantage les emballages du côté des fournisseurs.
Le souci est que parfois nous sommes limités dans notre entreprise, peut-être parce qu’aujourd’hui on essaye de se surprotéger. Parfois c’est un frein pour le recyclage des produits. Un exemple : une fois que les clients avaient acheté les œufs, notre petit producteur reprenait les plateaux sur lesquels les œufs étaient posés. Mais avec la réglementation actuelle il ne peut pas nous les reprendre. Nous nous sommes obligés de les jeter et lui d’en racheter des neufs.
C’est une des raisons pour lesquelles nous voulons développer le réseau local. On se rend compte qu’en circuit court on arrive beaucoup mieux à travailler en flexibilité avec les petits producteurs. Ils reprennent plus facilement les emballages. Si on veut atteindre le zéro déchet il faudra tendre vers une réutilisation des emballages pour éviter de les jeter.
Nous ne nous revendiquons pas zéro déchet mais notre conditionnement en génère moins qu’un magasin traditionnel. Notre rêve c’est de tendre vers un quasi zéro déchet. Avec les petits producteurs en circuit court, on remarque qu’il y a une grande avancée bien que parfois certaines réglementations représentent un frein dans ce domaine.
Propos recueillis par Valérie Velten